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A la tête du Département du logement, de l’environnement et de l’architecture de la Ville de Lausanne depuis le 1er juillet 2016, la municipale verte Natacha Litzistorf ne craint pas la gentrification, elle y voit plutôt l’occasion d’afficher une mixité sociale et générationnelle. Interview.
Que pensez-vous de la gentrification?
Natacha Litzistorf. La meilleure arme pour lutter contre les effets pervers de la gentrification consiste à mettre la mixité sociale et générationnelle au coeur des préoccupations. Pour ce faire, il faut une volonté politique forte (affirmer la vision d’une ville durable) et une approche multisectorielle de la question (décloisonnement et transversalité au sein de l’administration). Lausanne a mené et souhaite mener une politique du logement qui s’inscrive dans cette acception.
Dites-nous en plus…
Pour protéger les logements existants, nous nous appuyons sur deux lois vaudoises qui ont montré leur efficacité en protégeant le parc locatif et en maintenant des loyers abordables: la LDTR, qui évalue la nécessité des travaux et maintient des loyers abordables après les travaux de rénovation autorisés, et la LAAL, qui stipule que chaque vente d’appartement est soumise à autorisation. Cette dernière a été votée à la fin des années 80 pour prévenir des congésventes entraînant la disparition des logements en location à loyer abordable et leur transformation en PPE. Par ailleurs, la Ville étant un propriétaire foncier important, elle veille à ce que la mixité sociale et générationnelle soit réalisée dans tous les nouveaux projets développés sur des terrains communaux. Nous favorisons en particulier la création des logements régulés à loyer abordable dont l’évolution est strictement conditionnée au respect du droit du bail. Grâce à une application rigoureuse de ces deux lois, une attention permanente est portée sur la qualité de vie dans les quartiers.
Est-ce que Lausanne a déjà pu éviter ce phénomène dans un quartier en particulier?
La Ville favorise des opérations de rénovation d’immeubles anciens par des coopératives d’habitants, comme à l’Ilot Riponne - Tunnel, où les habitants ont constitué une coopérative pour rénover une soixantaine d’appartements en 2006- 2008, ou au 6 de la rue de l’Industrie, où une rénovation douce est en cours de la même manière.
Quels sont vos enjeux en matière de logement actuellement?
La Ville cherche surtout à renforcer les mixités et le lien social dans les quartiers. Nous considérons les espaces publics comme essentiels et consacrons des budgets pour l’amélioration des équipements collectifs et des aménagements extérieurs: plantages, places de jeu, zones de rencontre, etc. Dans le cadre de quartiers comme le Vallon, une réflexion est menée afin d’associer les habitants au développement urbain projeté. Le but étant de densifier le quartier en assurant le maintien des logements existants et du tissu d’activités artisanales, culturels et sociales. L’enjeu suprême reste le processus de production de nos villes et de leurs espaces publics: la participation des habitants doit y être intégrée systématiquement.
Un projet qui vous tient à coeur?
Le site de Sévelin. Nous lançons la construction d’une septantaine de logements subventionnés, de nonante chambres d’étudiant avec des surfaces d’activités au rez-dechaussée. Pour accompagner la création de ces logements, la Ville développe un nouveau plan de quartier qui propose une requalification de ce secteur en favorisant des activités sur le site, la mixité fonctionnelle et l’habitat. Il y aura aussi des espaces de rencontre conviviaux et des liaisons intéressantes avec les quartiers environnants.