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Paradoxe: les loyers des immeubles subventionnés procurent aux bailleurs un rendement supérieur aux loyers libres. Le Tribunal fédéral y a mis fin. En date du 25 septembre 2014, le Tribunal fédéral a rendu un arrêt révolutionnaire en ce qui concerne les loyers des immeubles subventionnés (cf. arrêt 1C_500/2013). Pour la première fois, il a indiqué que les règles concernant les rendements excessifs s’appliquent également à ces immeubles, contrairement à ce que prétendaient les bailleurs et les autorités publiques jusque-là. L’arrêt du Tribunal fédéral concerne un locataire vaudois, mais il a une portée générale pour tous les immeubles subventionnés par une entité publique et dont les loyers sont contrôlés par une autorité indépendante. Cela concerne donc aussi bien les logements subventionnés par la Confédération que ceux subventionnés par les cantons ou par une commune. Nouvelle lecture du Code des obligations Selon l’article 253b du Code des obligations (CO), les dispositions relatives à la contestation des loyers abusifs ne s’appliquent pas aux locaux d’habitation en faveur desquels des mesures d’encouragement ont été prises par les pouvoirs publics et dont le loyer est soumis au contrôle d’une autorité. On a donc longtemps cru que ces dispositions excluaient l’article 269 du même CO, lequel prescrit que les loyers sont abusifs lorsqu’ils permettent au bailleur d’obtenir un rendement excessif de la chose louée ou lorsqu’il résulte d’un prix d’achat manifestement exagéré. Le Tribunal fédéral n’a pas fait cette lecture. Il a indiqué clairement que l’article 253b CO excluait uniquement, sur le plan procédural, un double contrôle des loyers par le juge et par l’autorité administrative. Aussi pour les logements contrôlés par l’Etat En revanche, le Tribunal fédéral est arrivé à la conclusion que l’article 269 CO s’applique également aux loyers contrôlés par l’Etat: «En d’autres termes, les autorités administratives ne peuvent pas autoriser des loyers procurant au bailleur un rendement excessif des fonds propres investis dans l’immeuble ou résultant d’un prix d’achat manifestement exagéré.»De plus, ces loyers «ne doivent pas non plus prendre en compte d’autres critères de fixation du loyer que ceux relatifs aux coûts, en particulier les loyers comparatifs». Cet arrêt est une révolution, dans la mesure où il apparaît que les autorités ont admis des rendements largement supérieurs à ceux qui étaient permis en loyers libres, afin de convaincre des investisseurs de construire des logements subventionnés. Ce but était louable; malheureusement il est contraire au droit fédéral. Cela est d’autant plus flagrant à l’heure actuelle que le taux hypothécaire de référence est très bas, soit 2%. Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, le rendement rendement net des fonds propres investis ne peut pas dépasser 2,5%, soit un rendement très bas. Des rendements largement supérieurs sont autorisés par les différentes autorités, notamment le canton de Genève. Réaction de l’ASLOCA L’ASLOCA a d’ores et déjà interpellé Antonio Hodgers, chef du Département de l’aménagement, du logement et de l’équipement, afin qu’il prenne des mesures pour que les loyers des logements subventionnés soient conformes au droit fédéral et à cet arrêt du Tribunal fédéral. Ce dernier a d’ailleurs rappelé qu’«une vérification des loyers subventionnés est admise à titre rétroactif par rapport aux loyers déjà versés pendant toute la durée de la surveillance». A Genève, par exemple, les loyers des immeubles HLM sont contrôlés pendant vingt ans, de sorte que cet examen rétroactif devra être fait sur cette période. Des loyers à baisser Le fait que les loyers des immeubles subventionnés procurent aux bailleurs des rendements excessifs est aussi illustré par le fait que, à la sortie du contrôle de l’Etat, ces loyers doivent être baissés de 20 à 30% pour ne pas procurer aux bailleurs un rendement excessif. C’est tout de même un paradoxe que les loyers des immeubles subventionnés soient plus chers que les loyers libres. L’ASLOCA suivra avec attention l’application de cet arrêt du Tribunal fédéral dans les différents cantons.

François Zutter Avocat répondans Asloca Genève

9 février 2017
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