
n°169 - avril 2005
En 2004, le conseiller fédéral Joseph Deiss a relancé le débat sur le droit du bail. Il proposait une version édulcorée du contre-projet indirect rejeté par le peuple. Nous soulignions ici même qu’il n’était pas acceptable que l’on s’achemine vers un «copier-coller» législatif contraire à la volonté populaire. La majorité des organisations représentatives des milieux économiques et sociaux siégeant au sein de la Commission fédérale du logement, dont l’ASLOCA romande, ont cherché des pistes de révision.
L’ ASLOCA alémanique formulait une proposition intéressante, se rapprochant de l’Accord romand négocié à l’époque entre l’ASLOCA romande et la Fédération immobilière romande (FRI), soit une «petite révision» portant uniquement sur les modalités de fixation de loyer: maintien du loyer initial fondé sur les coûts et indexation des loyers en cours de bail à raison de 80% de l’ISPC.
De son coté, la FRI proposait une solution «dualiste», c’est-à-dire une solution laissant, lors de la conclusion du bail, le «libre» choix entre deux systèmes différents de fixation de loyer: l’un proposant la fixation du loyer initial et en cours de bail sur les coûts supportés par le bailleur et l’autre introduisant le loyer initial fixé sur les loyers comparatifs et l’indexation du loyer en cours de bail.
L’Office fédéral du logement a d’une part poussé la Commission fédérale du logement à poursuivre ses travaux dans le cadre cette solution dualiste et d’autre part suggéré à Joseph Deiss d’en faire sa proposition officielle.
Cette stratégie, officielle ou non, ne peut être admise par les locataires.
1) Comment se décider pour un système dualiste alors même que les tenants et aboutissants de chacune des méthodes ne sont pas encore définis? C’est opter, la tête dans le sable, pour la forme plutôt que pour une option de fond – comment calculer concrètement le loyer – est le cœur du problème et l’essentiel. Tous les locataires le savent.
2) Comment soutenir un modèle avec un choix virtuel pour le locataire? Personne n’est dupe, le bailleur tient le couteau par le manche lors de la conclusion du bail. Il imposera la méthode la plus rentable. Or le droit du bail est destiné à protéger le locataire en tant que partie faible. Ce point cardinal est oublié.
3) Le droit du bail sera plus compliqué. Deux méthodes de calcul du loyer se côtoieraient. Où est passé l’objectif de simplification du bail?
L’enjeu d’une révision du droit du bail est triple: simplifier le droit du bail, découpler les loyers du taux hypothécaire, et réduire les loyers (les plus chers d’Europe).
Le découplage ne peut se faire à n’importe quel prix. Tout particulièrement, il n’est pas imaginable de sacrifier l’objectif de lutte contre les loyers exorbitants.
Pour les locataires, il faut une seule méthode, celle de calcul des loyers fondée sur les coûts réels, assorti d’un système évitant la dépendance du locataire de son bailleur. C’est tout le contraire que Joseph Deiss semble vouloir nous servir en faisant sien le système dualiste de fixation de loyer.
Carlo Sommaruga
Articles issus du journal
Aucun article disponible