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Président du Conseil national en 2015, Stéphane Rossini a siégé durant seize ans à la Chambre basse. Aujourd’hui professeur de politiques publiques à l’Université de Genève et à l’Université de Neuchâtel, le Valaisan est consultant en politiques sanitaires et sociales à Haute-Nendaz et préside la Commission fédérale AVS-AI. Spécialiste des assurances sociales, il s’est penché sur la question de la solvabilité des personnes à la retraite. Interview.
Selon une étude de la HES de Lucerne, «32% des résiliations touchent des locataires âgées entre 65 et 74 ans alors que cette tranche d’âge ne représente que 12% de la population».
Comment expliquez-vous ce pourcentage?
Stéphane Rossini. Cette phase de la vie induit de nombreuses transformations, à la fois professionnelles et des modes de vie. Ainsi, la cellule familiale évolue, tout comme les besoins en espace de logement. Les aspirations personnelles et les contraintes physiques, par exemple l’entretien d’une maison ou d’un appartement, incitent à revoir l’adéquation du cadre d’habitation. Cela explique, en partie du moins, la proportion de résiliations de bail. On peut voir également dans ce processus une dynamique positive qui vise à améliorer la qualité de vie des seniors par une meilleure adéquation entre logement et situation personnelle et familiale.
Pensez-vous que les bailleurs craignent une certaine «insolvabilité» des seniors?
Par définition, la retraite provoque une baisse de revenu. Le système des «trois piliers» composé de l’AVS, de la LPP et des prestations complémentaires (PC) considère que le niveau de vie est maintenu lorsque les prestations de vieillesse correspondent à 60% du revenu antérieur. Le terme d’insolvabilité me semble trop fort pour caractériser le phénomène. Si le revenu est un élément de choix déterminant, l’état de santé ou la volonté de réduire le volume de logement disponible – les enfants n’étant plus là et libérant des pièces devenues vides mais coûteuses – ou l’intensité des contraintes d’entretien sont aussi des motifs à considérer.
Selon vous, est-ce que cette crainte de l’insolvabilité des seniors est fondée?
Le niveau de vie des retraites est une préoccupation politique majeure. Pour les catégories socio-professionnelles les plus défavorisées, une faible retraite sans réduction du coût du loyer peut clairement poser problème et provoquer de la précarité, voire de la pauvreté. L’augmentation des prestations complémentaires démontre que les rentes sont pour beaucoup encore trop basses.
Quelles sont les prestations sociales qui peuvent venir en aide aux seniors?
Au niveau fédéral l’AVS couvre le minimum vital, mais pas toujours! Avec la LPP les rentiers devraient pouvoir s’en sortir, à partir de 2025 du moins lorsque tous les assurés auront pleinement cotisé au système. Il faut donc encore compter avec les prestations complémentaires. Elles sont un droit. Les rentiers ayant des difficultés doivent les solliciter. Ils peuvent se renseigner au bureau communal AVS, à la caisse de compensation ou au service social communal ou régional de leur domicile. Les PC sont financées par la Confédération pour assurer le minimum vital défini dans la Constitution. Et puis, ultime recours, si les gens ne parviennent pas à s’en sortir: l’aide sociale. Elle est allouée par la commune. C’est un droit social, auquel il ne faut pas avoir honte de prétendre. Les prestations du système de santé peuvent aussi venir en aide aux seniors tout comme celles des associations (Pro Senectute, etc.).