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Les hommes font pousser des plantes grimpantes sur les murs et les façades de leur maison depuis bien longtemps. Cette végétalisation répondait à une époque surtout à des soucis d’ordre esthétique. De nos jours, elle correspond davantage à des préoccupations écologiques et de développement durable. Des fameux jardins suspendus et légendaires de Babylone à la pergola italienne, on a beaucoup créé de structures architecturales végétales. En Scandinavie, en Amérique du Nord et dans les pays froids en général, cette végétation, issue de l’environnement immédiat, coiffe les habitations traditionnelles et offre aux habitants un confort thermique particulièrement bienvenu durant la saison froide, tout en protégeant les constructions. Avec l’apparition des immeubles en béton et de leurs toits plats, l’idée de végétaliser ces grandes surfaces inaccessibles a peu à peu fait son chemin: les réalisations se sont multipliées, les techniques se sont améliorées, notamment grâce à l’impulsion de l’Allemagne et de la Suisse alémanique. Aujourd’hui, de New York à Singapour en passant par Londres, Paris, Lausanne, Neuchâtel et Genève, la plupart des grandes villes intègrent ou encouragent la végétalisation des toitures dans leurs projets d’urbanisme et d’architecture. Les toits en tuiles, l’asphalte, les pierres et le béton, le tout agrémenté de voitures, bus et trams sont caractéristiques de beaucoup d’agglomérations. Tous ces matériaux s’échauffent fortement; les agglomérations sont plus chaudes et plus sèches que les verdoyantes campagnes environnantes. Les toits et les façades végétalisés peuvent jouer un rôle essentiel. Les plantes influencent la température et l’humidité de l’air, mais elles captent aussi de nombreuses particules de l’air et donc aussi des polluants, les empêchant de se retrouver dans nos poumons. Finalement, la végétation protège les façades et le toit de l’érosion. Le climat dans la ville et à l’intérieur des maisons s'en trouve influencé positivement. La végétalisation sur l’espace vertical est moins gourmande en surface au sol et compense la perte végétale induite par le bâti. Elle favorise la biodiversité en milieu urbain. Les nouvelles constructions intègrent de plus en plus souvent des toits ou des façades végétalisés et de nombreuses villes encouragent ce genre d’initiatives. Du changement en vue Pour Nicole Graber, de la Fondation Nature & Economie, qui fait la promotion des environnements de travail, d’habitat et d’étude qui soient davantage proches du naturel et décerne un label de qualité à des sites exemplaires, le potentiel de surfaces que l’on peut rendre (à nouveau) plus naturelles est énorme. Pour elle, la végétalisation des toitures et façades fait partie de la «palette» des aménagements possibles, mais ne compense pas pour autant les pertes en nature «de pleine terre». Cette végétalisation a toutefois des résultats concrets au niveau de la qualité de vie et du bien-être social, notamment en ce qui concerne les aspects psychologique, esthétique, acoustique et olfactif. Entretien extensif versus entretien intensif Nicole Graber insiste également sur le fait qu'un entretien réduit, à savoir extensif, des zones vertes favorise la nature et s'avère à la longue plus économique. Un espace entretenu consciemment de manière extensive ne démontre pas, selon elle, un laisser-aller de la part de la gérance, du propriétaire ou du concierge, mais nécessite au contraire un savoir-faire et de la réflexion. Cela doit être choisi, surtout dans un objectif écologique (moins d'engrais, plus de variétés de plantes, davantage de cachettes pour petits animaux, etc.). Il est lointain le temps des grandes surfaces de gazon tondues et des haies de thuyas ultradroites. La mode est aux haies vives et aux prairies fleuries. Question de santé Selon une étude menée en France*, cinq facteurs sont importants pour expliquer le lien entre santé et espaces verts: ils encouragent l’activité physique, ils améliorent la qualité de l’air, ils protègent contre la chaleur, ils réduisent le stress de la vie quotidienne et ils renforcent le sentiment d’appartenance à la communauté. Cette étude fait ressortir que la relation espaces verts et santé est plus forte chez certains groupes de la population, comme les personnes âgées, les femmes au foyer et les individus de classe sociale modeste, ce qui peut s’expliquer partiellement du fait que les ménages modestes ont moins souvent un jardin privatif ou une résidence secondaire que les ménages plus aisés. Ils y voient donc une dimension de promotion d’une certaine équité sociale en matière de santé. L’étude démontre également que les espaces verts sont associés à une moindre prévalence des maladies cardiovasculaires, des troubles musculo-squelettiques, des problèmes respiratoires, des problèmes de santé mentale, des migraines, des vertiges et du diabète. Le lien de corrélation apparaît plus fort chez les personnes aux revenus modestes et chez les enfants. Il faut néanmoins souligner qu'au-delà d’un kilomètre l’effet des espaces verts sur la santé s’estomperait fortement. Les effets du film «Demain*» Les citadins sont également de plus en plus nombreux à vouloir se procurer une nourriture durable et d’origine locale. D’innombrables démarches en tout genre voient le jour en Suisse et ailleurs. Les Incroyables Comestibles, par exemple, ont pour objectif de semer, planter, cultiver fruits et légumes comestibles dans des jardins potagers privés ou dans des jardins publics. Puis récolter et partager le fruit de ces plantations avec tous les habitants. Des cours de jardinage, des échanges de graines (création de grainothèques), des livres toujours plus nombreux sur le jardinage voire la sylvothérapie (thérapie par les arbres ou «bain de forêt» au Japon): la nature, c’est tendance. Les jardins communaux se multiplient également dans les villes, mais l’espace au sol manque cruellement pour répondre à toutes les demandes. Les toits offrent par contre des surfaces immenses qui pourraient être exploitées par des associations de quartier, des écoles, des organismes de réinsertion, etc. pour autant que les contraintes techniques soient surmontables (accès, irrigation, sécurité). Mais, à l’échelle du locataire, qu’est-ce qui est possible? Que peut-on entreprendre de concret pour profiter des vertus de la verdure? Un potager sur le balcon Vincent Gigon, maître d’enseignement à l’Hepia (Haute école du paysage, d’ingénierie et d’architecture de Genève), constate que les plantations par les citadins sont à la mode. Il ne conseille pas forcément de prendre un cours de jardinage, même si cela peut être utile afin d’éviter de faire des erreurs grossières et de perdre du temps ou de l’argent. Il faut connaître quelques principes de base. Cela dépend aussi des plantations dans lesquelles on se lance! Il conseille néanmoins d’acheter ses plantes avec mottes avec les plantes au lieu d’essayer les semis, qui sont certes moins coûteux mais qui peuvent donner de moins bons résultats. «Acheter les plants en magasin, ça revient plus cher, mais c’est plus sûr et plus simple pour un débutant», explique Vincent Gigon. Avant la mi-mai, il faut protéger les plantations du gel, qui est encore possible dans nos régions. Quels sont les problèmes que l’on peut rencontrer dans ces plantations de balcon ou de terrasse? Pour ce spécialiste, les obstacles sont quasi les mêmes que pour la culture au sol: trop d’humidité, terreau de mauvaise qualité, température trop basse ou trop élevée et arrivée de maladies et d’insectes ou pucerons. Le fait que les jardinières soient protégées de la pluie, ce qui est possible sur un balcon, diminue grandement les risques de contamination et de maladie. Bien sûr, il s’agit pour les locataires d’un hobby et non pas d’une production rentable. On axe avant tout sur le plaisir de cueillir ses propres tomates cerises au lieu d’aller les chercher en magasin, ou de cueillir son basilic, son persil, etc., juste avant de l’utiliser en cuisine. Si on veut installer de grands sacs de jardinage ou de grands pots, il faut veiller à ce que le poids ne dépasse pas ce que le balcon peut supporter. Il faut bien se renseigner, car les plantations peuvent peser très lourd. Si vous voulez en savoir plus sur les possibilités de cultiver vos propres légumes ou plantes aromatiques chez vous, les livres sur le sujet sont très nombreux et les sites également. La Fête de la nature (www.fetedelanature.ch) a lieu du 25 au 27 mai 2018 et de nombreux évènements auront lieu partout en Suisse romande à cette occasion, dont des initiations pour les futurs jardiniers.

Henriette Schaffter 

Rédactrice en chef

*«Demain», film de Cyril Dion et Mélanie Laurent, sorti en 2015. Sources: Toitures végétalisées, publication du Service des parcs et domaines de la Ville de Lausanne. La végétalisation des façades et des murs, Guide nature en ville, Ville de Neuchâtel Les espaces verts urbains: lieux de santé publique, vecteurs d’activité économique. Étude Asterès.
7 septembre 2018
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